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Alors que le découplage des politiques monétaires est en passe d’être acté des deux côtés de l’Atlantique, la tendance favorable sur la technologique américaine a été renforcée par les résultats trimestriels.

Comme chaque mois, Christopher Dembik (Conseiller en stratégie d’investissement chez Pictet Asset Management) a tenu son webcast sur la situation des marchés et la stratégie d’allocation d’actifs, dans un contexte caractérisé par une inflation qui s’avère persistante aux Etats-Unis et qui complique le travail de la Réserve Fédérale. A l’occasion de cette webcast, un éclairage plus particulier a été apporté sur les grands risques géopolitiques.

Désordre monétaire

Durant le mois écoulé, il souligne que la situation s’est un peu éclaircie du côté européen au niveau macroéconomique, avec une baisse confirmée des tensions inflationnistes. « Nous pensons que la BCE va intervenir très rapidement, avec deux baisses de taux de 0,25% possibles en juin et juillet ». Il souligne plus particulièrement que les craintes d’une inflation soutenue par les salaires ne s’est clairement pas mise en place. « Nous sommes aujourd’hui plutôt sur une tendance baissière, avec le risque éventuel d’une boucle prix-salaires qui est très clairement exclu ».

Pour ce qui est de la Réserve Fédérale, Christopher Dembik estime que la politique monétaire n’est pas suffisamment restrictive si l’objectif est de contrôler l’inflation. « Cela ne veut pas dire qu’on va avoir une hausse du taux directeur car la Fed aura à cœur de conserver sa crédibilité. Changer d’orientation maintenant serait un discrédit massif et un aveu d’échec extrêmement important. Dès lors, l’inflation va rester durablement élevée aux Etats-Unis, avec une myriade d’indicateurs qui vont dans ce sens-là, et que la baisse des taux s’éloigne de plus en plus ». S’il indique rester pour l’heure sur un scénario de deux baisses du taux directeur pour 2024, il pointe une marge de manœuvre beaucoup plus réduite, avec une détente qui pourrait être reportée jusqu’en 2025 en fonction des données qui seront publiées.

« Le découplage des taux entre les deux bords de l’Atlantique est systématiquement synonyme de désordre monétaire et financier, dans un univers où le dollar reste hégémonique ». Il souligne que la faiblesse du yen japonais va se poursuivre, avec une fébrilité qui touche aujourd’hui quasiment l’intégralité des devises asiatiques. « A un certain stade, les conséquences de la politique menée par la Fed vont également toucher la BCE ». Pour autant, il estime que l’argentier européen va probablement se démarquer de la Réserve Fédérale, à l’image d’autres banques centrales (Suisse, Canada, Suède, etc) occidentales. « Dans le contexte actuel, c’est plutôt la Fed qui fait bande à part par rapport aux autres banques centrales ».

Tensions asiatiques

Christopher Dembik a également tenu à faire un point sur les grands points de tension actuel au niveau géopolitique, avec tout d’abord la prochaine élection présidentielle aux Etats-Unis qui se profile et une éventuelle élection de Donald Trump qui pourrait entraîner des sanctions contre les pays qui chercheraient à se détourner du dollar, et notamment la Chine qui continue d’acheter massivement de l’or depuis 17 mois. « Beaucoup de pays émergents ont également adopté cette stratégie, notamment l’Inde qui a acheté plus d’or sur le premier trimestre 2024 que sur l’ensemble de l’année 2023 ». Il estime que si le retour aux affaires de Donald Trump serait un peu plus compliqué à gérer, l’impact sur les marchés financiers ne devrait pas s’inscrire dans la durée.

A moyen terme, il estime que l’Asie va rester le point central des tensions géopolitiques globales, et notamment la situation de la Chine face à Taïwan, aux Philippines, aux Etats-Unis et à l’Inde. « La situation se met en place pour un choc des titans entre la Chine et l’Inde, avec un rapport qui est aujourd’hui très déséquilibré d’un point de vue économique et militaire, dans une région où passe une très grande partie de notre commerce extérieur ». En termes d’allocation d’actifs, il estime qu’il reste très « dur d’extrapoler un impact éventuel d’un conflit dans cette région. « Historiquement, le risque géopolitique est souvent très vite digéré, et le début des conflits engendre souvent une période de volatilité susceptible d’offrir  des opportunités d’investissement ».

Attrait technologique

Au niveau de l’allocation d’actifs, Christopher Dembik souligne qu’il y a eu peu de changement par rapport au mois précédent, avec une conviction dans le positionnement sur la technologique américaine qui a plutôt été renforcée par les publications des résultats trimestriels. « Ils ont été dans l’ensemble très bons, avec des grandes capitalisations qui ont continué de mener la danse avec des marges solides ».

D’un autre côté, la dynamique au niveau des rachats d’actions s’est poursuivie, notamment pour Apple qui a annoncé le plus massif programme rachat d’actifs dans l’histoire des entreprises américaines, de l’ordre de 110 milliards de dollars. « C’est certainement un argument extrêmement important pour être toujours positif sur les actions américaines, d’autant que la valorisation a plutôt eu tendance à se normaliser durant les derniers mois ».

Enfin, il pointe également vers la date du 22 mai, avec des chiffres trimestriels de NVidia qui devraient continuer de surprendre favorablement (comme huit fois sur les neuf derniers trimestres), et permettre aux technologiques américaines de poursuivre leur marche en avant. « Avec le récent rachat de Run:ai,  NVidia essaie de se positionner sur des plateformes d’IA à destination du grand public et des PME, afin d’être positionné sur l’intégralité de la chaîne de valeurs de l’intelligence artificielle, soit faire ce Microsoft avait réalisé avec Windows dans le domaine de l’informatique il y a quelques décennies ».

Frédéric Lejoint

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