ODDO BHF Asset Management
Initiée en 2022 à Nairobi au Kenya lors de l’Assemblée des Nations Unies pour l’Environnement, le processus de mise en œuvre d’un traité mondial contre la pollution plastique entrait dans sa dernière phase fin novembre à Busan en Corée du Sud. Le plastique représente environ 3,4% des émissions mondiales de CO2 et sa production devrait doubler d’ici 2050 sans efforts significatifs sur le recyclage et la recherche d’alternatives de substitution. A ce stade des discussions, deux visons s’affrontent, l’une poussant à des objectifs chiffrés de réduction de la production de plastique en complément du développement du recyclage alors que l’autre défend une approche centrée sur les mesures en aval dont le recyclage. Quelque soit l’issue des négociations, le futur traité contre la pollution plastique sera un moteur de croissance structurel pour le secteur du recyclage et les producteurs de substituts au plastique.
UN ENJEU MAJEUR EN MATIÈRE D’ENVIRONNEMENT ET DE SANTÉ
Depuis les années 1970, le taux de production de plastique a augmenté plus rapidement que celui de tout autre matériau. Si cette tendance se poursuit, la production mondiale de plastique primaire devrait atteindre 1 100 millions de tonnes d’ici 2050 contre 460 en 2023, une hausse accentuée par le recours croissant au plastique à usage unique représentant 76% de la production annuelle. Aujourd’hui, seulement 15% des déchets plastiques sont recyclés, 17% sont incinérés, et 68% finissent dans les décharges ou dans la nature. L’enjeu environnemental est donc énorme puisque de nombreux écosystèmes naturels sont touchés. Faute d’être efficacement collectés, les déchets plastiques sont charriés par les cours d’eau à l’intérieur des terres jusqu’aux mers et océans. Les dernières estimations connues font état de 150 millions de tonnes de déchets plastiques dans les océans, provoquant en parallèle la présence de quelques 20 000 milliards de particules de micro- plastiques flottant à la surface. La conséquence directe est qu’environ 700 espèces de la faune marine ingèrent ces particules, posant en bout de chaine un risque pour la santé humaine.
LES SOLUTIONS EXISTENT, MAIS L’ENJEU RESTE LEUR DÉPLOIEMENT À GRANDE ÉCHELLE
Produire moins de plastique nécessite le développement à grande échelle d’alternatives présentant les mêmes caractéristiques de résistance, de poids ou bien encore de diversité d’usage. Certaines innovations ont vu le jour depuis une dizaine d’années (plastique d’algue, de graines d’olives, de cactus, ou bien de résidus de sucre de canne, ), mais leur développement n’est resté pour l’instant qu’embryonnaire faute de modèle économique pérenne.
Le principal levier d’action pour réduire la pollution plastique reste le recyclage. Encore trop peu répandu (15% seulement des déchets plastique sont recyclés dans le monde), il nécessite des mesures ambitieuses dans au moins trois domaines :
- La régulation : depuis quelques années les régulations se sont multipliées, essentiellement dans les pays développés, avec une croissance des activités de recyclage de 7% à 10% selon les zones. L’Asie-Pacifique a connu la plus forte croissance en la matière, devant l’Europe et l’Amérique du Nord. À titre d’exemple, l’Union Européenne s’est fixé un objectif de 55% de recyclage des emballages plastiques en 2030, plusieurs états aux États-Unis ont fixé un cadre réglementaire pour restreindre l’usage du plastique vierge (non issu du recyclage), et le Japon déploie une stratégie des 3R (Réduire, Réutiliser, Recycler) ;
- Le développement technologique : la majorité du plastique recyclé aujourd’hui concerne les emballages alimentaires en polytéréphtalate d’éthylène (PET), 100% recyclable par procédés mécaniques (tri, nettoyage, broyage, granulation). La limite du recyclage mécanique est qu’il ne fonctionne que pour la famille des thermoplastiques (propriété de se ramollir en chauffant) à la différence d’autres plastiques très utilisés pour des applications industrielles ou dans la construction tels que les élastomères (pneus, textiles, joints d’étanchéité…) et les thermodurcissables (résines dans les matériaux mélaminés par exemple). Pour y remédier, des technologies de recyclage chimique commencent à voir le jour depuis quelques années, mais beaucoup en sont encore au stade de l’expérimentation. Le recyclage chimique consiste à modifier les structures des polymères présents dans les déchets en ayant recours à des procédés tels que la dépolymérisation, la dissolution ou bien la pyrolyse, afin de les transformer en une nouvelle matière première aux caractéristiques identiques aux plastiques vierges ;
- Les infrastructures : pour accompagner les ambitions réglementaires et la demande croissante des consommateurs pour des modèles d’économie circulaire, les pouvoirs publics doivent faciliter le développement d’infrastructures dédiées au recyclage du plastique. Ce point est particulièrement prégnant en Amérique du Nord et en Europe, deux zones habituées à envoyer un volume important de déchets plastiques en Chine, laquelle en a fait un véritable secteur économique des décennies durant. Mais depuis 2018, la Chine a décidé d’interdire l’importation de déchets plastiques sur son sol, mettant devant leur responsabilité de nombreux pays.