Le private equity, qui consiste à investir dans des sociétés non cotées en bourse, intéresse de plus en plus les investisseurs privés en quête de diversification dans leurs portefeuilles. Déjà bien implantée en Flandre, Top Tier Access vise désormais la Wallonie et ses familles fortunées.
Aux commandes de la société d’investissement Top Tier Access (TTA), il y a Sam Desimpel, descendant des actionnaires familiaux de l’ancien fleuron flamand de la brique, Desimpel à Kortemark, passé sous contrôle britannique en 1996. Mettant à profit son vaste réseau relationnel, celui-ci organise, dès 2017, des événements axés sur les investissements privés pour les familles entrepreneuriales du nord du pays. Certaines d’entre elles rêvent d’avoir accès aux grands fonds de private equity, souvent hors de leur portée en raison d’un seuil d’entrée très (trop) élevé. L’occasion faisant le larron, Sam Desimpel et son associé, Joel Sandhu, décident alors de quitter le secteur de l’événementiel et de lancer un fonds investissant exclusivement dans d’autres fonds gérés par des ténors internationaux du private equity tels que CVC, Insight Partners ou encore NMC (on parle d’un « fonds de fonds » dans le jargon professionnel).
Un positionnement stratégique efficace
Le succès est immédiat car Top Tier Access a mis trois atouts dans sa manche : profiter des avantages fiscaux offerts par le véhicule d’investissement qu’est la pricaf privée de droit belge d’une part, la sélection des fonds les plus performants de Buy-out et réduire au maximum les frais de gestion d’autre part. La société a investi jusqu’ici quelque 200 millions d’euros via un premier, puis un deuxième fonds de fonds. « Notre sélection de fonds sous-jacents est extrêmement rigoureuse, combinant des éléments quantitatifs (critères de performance) et qualitatifs (culture de l’équipe, bonne gouvernance). Pour le dire simplement, nous recherchons des fonds qui achètent les bonnes entreprises, les développent de manière optimale et les revendent facilement – c’est-à-dire sans être dépendants de marchés publics pour se désengager », explique Sam Desimpel. « Pour rebondir sur l’aspect qualitatif, nous vérifions, par exemple, que les engagements vis-à-vis des entreprises rachetées soient respectés, que le personnel de la société de gestion du fonds soit bien traité et que les « juniors » soient autorisés à nous parler lors du processus de due diligence. Il n’y a guère plus de 50 à 60 fonds de private equity en Amérique du Nord et en Europe (hors Benelux) qui répondent à l’ensemble des critères définissant notre univers d’investissement », ajoute Yana Rudenko, Investor Relations Associate chez Top Tier Access.
Poursuivant sur sa lancée, Top Tier Access lève actuellement 100 millions d’euros supplémentaires. Cette nouvelle levée de fonds, dont la clôture est prévue pour le second trimestre 2025, est concomitante au développement de deux nouveaux fonds. Le premier a une stratégie d’investissement « large cap » (sociétés sous-jacentes à grande capitalisation) répartie à parité entre l’Amérique du Nord et l’Europe, assez similaire à celle des deux fonds TTA de départ. Le second se concentre sur les petites et moyennes capitalisations, uniquement sur le marché européen cette fois. « Des sociétés générant un cash-flow de 1 à 10 millions d’euros, pour lesquelles le travail à fournir en termes de professionnalisation, de digitalisation et d’augmentation de la base de clients, est beaucoup plus important, mais où les opportunités de croissance sont considérables », précise Yana Rudenko.
Séduire les investisseurs francophones
Avec quatre fonds de fonds de private equity, la société d’investissement bruxelloise devient un interlocuteur qui compte sur le marché national. Déjà bien implantée en Flandre, elle se tourne désormais aussi vers les investisseurs francophones. « Nous avions déjà des clients bruxellois et wallons, mais il s’agissait principalement de professionnels actifs dans le secteur du capital-investissement, comme des avocats d’affaires ou des consultants en fusions-acquisitions. Nous nous tournons maintenant vers les entrepreneurs et les familles fortunées du sud du pays », souligne Yana Rudenko.
Avec un seuil d’entrée fixé à 250 000 euros, Top Tier Access espère séduire un grand nombre de fortunes wallonnes et bruxelloises. Deux Family Officers francophones ont d’ores et déjà intégré le comité d’investissement du troisième fonds « large cap » – la récompense d’un investissement « conséquent ». « Les investisseurs francophones accordent plus d’importance que leurs homologues flamands à l’aspect relationnel », s’amuse le cofondateur de Top Tier Access.
Une certaine méconnaissance du private equity
Au niveau mondial, le private equity représenterait le deuxième poste dans la répartition des actifs des portefeuilles des Family Offices les plus importants, après les actions de sociétés cotées. On est assez loin du compte en Belgique et dans d’autres pays européens où les actifs privés (capital, crédits, dettes, etc.) sont nettement moins demandés par les investisseurs privés. « Les mentalités sont peut-être un peu plus conservatrices sur le Vieux Continent, il y a donc un travail d’éducation à faire », concède Sam Desimpel. C’est pour répondre à cette méconnaissance et former la Next Gen qu’il a mis sur pied des séances d’information à destination des enfants de ses clients investisseurs. Objectif : faire grimper le niveau moyen de ces placements alternatifs autour de 20 % dans les portefeuilles des investisseurs privés belges.