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Le marché du travail connait des soubresauts inquiétants aux Etats-Unis, ce qui pourrait contraindre la Réserve Fédérale à intervenir plus rapidement que prévu pour dynamiser l’économie.

A l’occasion de ses prévisions économiques pour le mois d’août, Marc-Antoine Collard (Economiste en chef et Directeur de la recherche macroéconomique chez Rothschild & Co Asset Management) a mis en évidence les doutes récemment apparus quant à la résilience économique des Etats-Unis, notamment suite à la publication des statistiques pour le marché du travail à la fin du mois de juillet.

Signaux américains

Tout d’abord, il rappelle que l’économie américaine avait fortement surpris en 2024, en « surpassant la plupart des pays développés grâce à des mesures de soutien généreuses qui ont stimulé la demande intérieure », et se sont également marquées par l’aggravation du déficit public.

« De plus, les effets négatifs du resserrement de la politique monétaire n’ont pas seulement été compensés par l’assouplissement de la politique budgétaire, mais les mécanismes de transmission de la politique monétaire sur l’économie réelle ont probablement souffert de délais plus longs que d’habitude ». Il pointe notamment que dans le secteur du logement, le volume élevé des prêts à taux fixe a retardé la hausse des charges hypothécaires pour les emprunteurs.

Cependant, les dernières données suggèrent que les effets du resserrement de la politique monétaire orchestré par la Réserve Fédérale depuis 2022 sont de plus en plus visibles. Sur le marché du logement, Marc-Antoine Collard indique que « les ventes de maisons ont chuté ces derniers mois pour atteindre un creux de près de 30 ans, avec des mises en chantier qui ont été particulièrement faibles ». Il pointe également la hausse des problèmes de remboursement pour les prêts automobile ou sur des découverts liés aux cartes de crédits.

Baisse du taux directeur

Plus important encore, le marché du travail semble s’être détérioré beaucoup plus rapidement que prévu, avec des créations d’emplois qui sont tombées à 114000 en juillet contre un chiffre de 206000 créations d’emploi en juin, soit bien en dessous des attentes du marché. Dans le même temps, le taux de chômage a augmenté à 4,3%, une hausse en partie due à des licenciements temporaires suite au passage de l’ouragan Beryl au Texas. « De plus, une partie de la récente augmentation du chômage s’explique également par une croissance de la population active ».

Marc-Antoine Collard estime en conséquence qu’une baisse de 0,25% du taux directeur de la Réserve Fédérale est aujourd’hui acquise pour la prochaine réunion de septembre. « Et d’un point de vue de gestion des risques, une réduction de 50 points de base (0,5%) ne peut être exclue » en cas d’aggravation de la situation sur le marché du travail.

Morosité chinoise

Du côté de l’autre géant économique au niveau mondial, l’activité économique a continué d’être sous pression durant le deuxième trimestre, avec un rythme de croissance du PIB chinois qui est ressorti à son plus faible niveau depuis le début 2022. Marc-Antoine Collard souligne que la faiblesse des indices manufacturiers durant les trois derniers mois laisse également craindre un mauvais troisième trimestre, tandis que l’impact des mesures de soutien récemment annoncées reste incertain dans un contexte de morosité pour la demande domestique chinoise.

« Malgré un programme annoncé en grande pompe en mai dernier où le gouvernement central devait en partie se porter acquéreur des maisons invendues, le marasme du secteur immobilier se poursuit et continue de peser sur l’économie en raison notamment d’une faible capacité financière des gouvernements locaux et d’un appétit limité de la part des banques ». Enfin, l’économiste en chef de Rothschild & Co Asset Management constate que les exportations chinoises restent sous pression en raison des tensions commerciales avec les Etats-Unis et l’Europe, marquées par des hausses de tarifs douaniers annoncées durant les derniers trimestres.

Détente européenne

Dans ce contexte économique plus incertain pour ses deux grands partenaires commerciaux, la zone euro a enregistré une forte détérioration de la confiance des entreprises durant les deux derniers mois (juin et juillet), des éléments qui pourraient convaincre la Banque Centrale Européenne à relâcher plus rapidement son taux directeurs durant les prochains mois. Mais dans le même temps, l’inflation de la zone euro a de nouveau dépassé les attentes durant le mois de juillet, avec une inflation sous-jacente inchangée à 2,9% en rythme annuel en raison de la persistance de la hausse des prix dans le secteur des services.

« La chute des rendements des obligations souveraines mondiales est le reflet d’anticipations des investisseurs d’un assouplissement majeur et coordonné des banques centrales, dans un contexte de craintes croissantes concernant un affaiblissement plus rapide que prévu il y a quelques semaines à peine  pour la croissance économique globale », conclut Marc-Antoine Collard.

Frédéric Lejoint

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