Pistes de réflexion pour la Fed
César Pérez Ruiz, CIO et responsable des investissements, Pictet Wealth Management.
REVUE HEBDOMADAIRE
A l’issue d’une semaine écourtée, les marchés actions américains ont poursuivi leur avancée, le S&P 500 enregistrant un rendement global de plus de 10% (en USD) au premier trimestre, soutenu par l’enthousiasme suscité par l’intelligence artificielle (IA), la perspective de baisses de taux, la bonne tenue de l’économie américaine et l’amélioration des prévisions de résultats. La semaine dernière, nous avons eu la confirmation que les gains du marché ne concernaient plus seulement les poids lourds de la technologie, comme l’a montré l’indice Russell 2000 des petites capitalisations, qui a enregistré une hausse supérieure à celle du S&P500, tandis que le Nasdaq reculait légèrement. Les marchés chinois et asiatiques (hors Japon) ont été à la peine la semaine dernière, comme ils l’avaient été tout au long du premier trimestre. Les marchés des obligations d’Etat ont été calmes la semaine dernière, malgré des rendements globalement toujours en hausse par rapport au premier trimestre. Signe de l’appétit pour le risque, les crédits non-investment grade ont surperformé leurs homologues investment grade au premier trimestre. Malgré la hausse des rendements américains et les taux réels élevés, l’or a augmenté au premier trimestre et la semaine dernière, tout comme le pétrole.
CITATION DE LA SEMAINE
« La date exacte de la première baisse [de la BCE] – avril ou début juin – n’a pas une importance existentielle… Je redis ici ma conviction qu’elle devrait avoir lieu au printemps, et ceci indépendamment du calendrier de la Réserve fédérale américaine. »
François Villeroy de Galhau, gouverneur de la Banque de France
INDICATEURS CLÉS
L’indice global des dépenses de consommation des ménages (PCE) aux Etats-Unis a progressé à 2,5% par an en février, le PCE sous-jacent ressortant à 2,8%. Les dépenses de consommation ont bondi de 0,8% en février (contre 0,2% en janvier), tandis que la croissance du PIB américain était révisée à la hausse pour atteindre un taux annualisé de 3,4% au quatrième trimestre, contre 3,2%.
En Allemagne, l’indice GfK de confiance des consommateurs a progressé pour le deuxième mois consécutif en mars. En revanche, les ventes de détail allemandes ont chuté plus que prévu en février (-1,9% par rapport à janvier et -2,7% par rapport à un an plus tôt), tandis que les cinq principaux instituts de recherche économique abaissaient leurs prévisions de PIB 2024 pour l’Allemagne à 0,1%, contre une projection précédente de 1,3%.
L’indice des prix à la consommation sous-jacent dans la région de Tokyo a augmenté de 2,4% en glissement annuel en mars, contre 2,5% en février. Les indices officiels des directeurs d’achat des secteurs manufacturiers et des services chinois ont progressé en mars, à 50,3 et 53, respectivement.
ANALYSE DES MARCHÉS
Les chiffres du PCE aux Etats-Unis en février sont apparus plus ou moins en ligne avec les attentes. Toutefois, l’augmentation du PCE sous-jacent à trois mois annualisé de 3,5% (contre 2,6% en janvier) pourrait donner à la Fed matière à réflexion. En outre, la remontée des marchés et la reprise des fusions-acquisitions (voir ci-dessous) suggèrent des conditions de financement pas si mauvaises malgré les relèvements de taux successifs. Alors que le gouverneur de la Fed Christopher Waller a déclaré qu’il ne voyait «aucune urgence» à baisser les taux, des questions continueront de se poser quant au calendrier et à l’ampleur de l’assouplissement monétaire aux Etats-Unis dans les mois à venir.
Les opérations de fusion-acquisition d’une valeur d’au moins 10 milliards de dollars ont plus que doublé au premier trimestre, passant de 5 à 11 par an, et la valeur totale des fusions- acquisitions mondiales a augmenté de 30%. L’ensemble de ces éléments indiquent une reprise des opérations de fusion-acquisition après deux ans d’activité atone. Les opérations importantes sont concentrées aux Etats-Unis pour le moment, mais la reprise pourrait s’étendre à l’Europe et à l’Asie dans les mois à venir.
Le déficit public de la France a bondi à 5,5% l’année dernière, dépassant les prévisions, et contraignant le gouvernement à dresser tant bien que mal un plan d’économies. Si ajoute la décision rendue à la fin de l’année dernière qui a forcé le gouvernement allemand à geler les nouvelles dépenses budgétaires. Le resserrement budgétaire nous paraît l’un des principaux risques pour le redressement de l’économie de la zone euro.