« Le marché des obligations à haut rendement est un regroupement d’entreprises qui n’ont souvent presque rien en commun. C’est la raison pour laquelle cette niche se prête à la gestion active », explique Jim Dudnick, co-gestionnaire du fonds Allianz US Short Duration High Income Bond.
Nous échangeons avec l’investisseur obligataire expérimenté pendant qu’il sillonne l’Europe pour discuter des activités de son fonds avec des clients. « Nous voyons un très vif intérêt pour ce type de stratégie en Europe ». Interrogé sur les raisons de cette forte demande, Dudnick indique en premier lieu les fortes performances historiques du fonds. « De plus, le fonds n’a pas seulement bien performé sur des marchés ensoleillés. L’année 2022, par exemple, a été exceptionnellement mauvaise pour les obligations, mais nous avons réussi à limiter les pertes à l’époque. Alors que beaucoup d’investisseurs ont vécu une année extrêmement difficile, 2022 a en réalité confirmé notre approche ». Voilà qui nous amène à l’un des objectifs du fonds : la protection du capital. Par ailleurs, le fonds fixe comme objectifs principaux une liquidité élevée et un rendement total positif.
Approche axée sur les résultats
Pour atteindre ces objectifs, les gestionnaires partent d’une « approche axée sur les résultats ». Mais qu’est-ce que cela signifie dans la pratique ? « Nous entendons par là que nous n’utiliserons pas de benchmark comme critère de référence pour ce fonds. Nous ne cherchons pas à égaler les bénéfices ou les pertes du marché pour les obligations à haut rendement ». Les gestionnaires recherchent, par une étude poussée, des entreprises dont les dettes arrivent à échéance et qui vont rembourser au pair ou au-dessus du pair.
« Comme nous nous concentrons sur le niveau inférieur au segment investment grade, nous pouvons obtenir de façon cohérente des revenus plus élevés qu’au segment investment grade ou des obligations d’État », explique Dudnick. Il ajoute toutefois un « mais » de taille. Les gestionnaires doivent en effet prendre en compte le fait que les obligations à haut rendement, en tant que classe d’actifs, traversent des périodes de grande illiquidité. « Dans ces moments-là, les prix baissent et beaucoup d’argent sort du marché ».
C’est pourquoi les gestionnaires donnent priorité à la liquidité. « Nous visons la préservation du capital et la génération de revenus, mais au sein d’un produit liquide », déclare Dudnick. « Nous devons veiller pour nos clients à ce que le fonds reste suffisamment liquide, afin qu’ils puissent adhérer et se retirer à leur guise. Nos investisseurs bénéficient d’une valeur intrinsèque du fonds actualisée quotidiennement, alors que de nombreux fonds alternatifs ne l’offrent souvent que sur une base mensuelle ou trimestrielle ». Lorsqu’un client veut monétiser ses ressources dans le fonds, cela peut donc se faire rapidement et facilement.
Large diversification
La question de chaque investisseur est évidemment simple : « qu’est-ce que j’y gagne » ? « Cette stratégie, qui joue sur les obligations américaines à court terme à haut rendement, ne devrait dans la pratique pas être aussi impactée par la hausse des taux que les autres fonds. En effet, les sociétés émettrices de ce type d’obligations rembourseront généralement leurs dettes avant la date d’échéance. » Dudnick décrit donc le fonds comme un bon moyen d’obtenir une large diversification dans l’univers obligataire.
« Le fonds prend en effet des risques différents des autres valeurs traditionnelles à taux fixe. Il prend un peu de risque de crédit et un peu de risque de liquidité, mais pas de risque de taux d’intérêt large », explique-t-il. Selon le gestionnaire du fonds, il s’agit d’une excellente stratégie pour profiter des taux élevés, tout en évitant de prendre un risque de crédit excessif. « Il est de notre tâche d’essayer de prendre un peu de risque de crédit et de liquidité, mais pas autant que l’ensemble du marché. Nous appliquons également une utilisation asymétrique du risque de taux d’intérêt, tandis que certaines holdings du fonds pourraient produire un gain en capital si les taux venaient à baisser ». Mais en cas de hausse du taux, le fonds réinvestit beaucoup plus vite dans les coupons qui augmentent.
S’appuyer sur l’expérience
Le fonds affiche de beaux résultats à court et long terme. Même en 2022, qui était pourtant une très mauvaise année pour les investisseurs obligataires. Interrogé sur le secret de ce succès, Dudnick évoque la vaste expérience de son équipe et les nombreuses données à disposition. « Nous menons cette stratégie depuis fin 2009, nous disposons ainsi de 170 mois de données cohérentes et de connaissances du cycle de crédit en cours. Il est important de pouvoir anticiper ce qui va se passer. Steven Gish et moi collaborons depuis dix-neuf ans sur le marché des obligations à haut rendement. Ce genre d’expérience est difficilement imitable. »
Il indique également que les gestionnaires misent activement sur la préservation du capital. Ils ajoutent ainsi une protection supplémentaire que l’indice n’a pas. « L’indice n’est pas axé sur ce point. Nous offrons une performance plus prévisible en n’investissant que dans une partie de l’univers », explique Dudnick.
Terrain de jeu pour la gestion active
Nous en venons ainsi à la question de savoir quelle plus-value peut offrir une gestion active dans l’univers obligataire. « Il est important de garder à l’esprit que le marché des obligations à haut rendement est un regroupement d’entreprises qui n’ont souvent presque rien en commun. » C’est pourquoi, selon Dudnick, il s’agit d’un environnement idéal pour les gestionnaires actifs.
« Des décisions et des choix actifs peuvent bel et bien apporter une valeur ajoutée aux investisseurs. La gestion active permet d’obtenir un résultat totalement différent de celui de l’indice large », explique Dudnick.
Dans le monde large de l’investissement, la gestion passive fait de plus en plus son entrée dans presque tous les domaines. Mais selon Dudnick, le marché des obligations à haut rendement est fait pour les gestionnaires actifs. « C’est l’une des rares niches dans le monde de l’investissement où la gestion active peut encore réellement faire la différence. Cela vient du fait qu’une bulle d’incertitude géante se forme dans ce segment, beaucoup de ces sociétés n’ayant rien en commun ».
C’est pourquoi Dudnick insiste encore et encore sur la compréhension du marché des obligations à haut rendement. « Il existe un malentendu sur le véritable enjeu de ce sous-marché. Il ne faut pas y voir un gros bloc homogène. Il s’agit d’une multitude d’entreprises avec une identité propre, ce que l’on peut mettre à profit en opérant des choix actifs ».