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L’impact des mesures prises par l’administration Trump ne devrait pas être aussi important que les craintes du marché.

C’est fortement grippé que Christopher Dembik (Conseiller en stratégie d’investissement chez Pictet Asset Management) a récemment animé son webinaire mensuel détaillant ses attentes macroéconomiques et les implications pour le positionnement des portefeuilles. « Sans trop de surprise, l’actualité des dernières semaines a été dominée par  la guerre commerciale menée par l’administration Trump ».

Consommation résiliente

Au niveau de l’économie américaine, il souligne que les perspectives restent assez favorables. « Les dernières études économiques montrent une croissance américaine qui s’est étoffée au cours des dernières années, et qui continue à dépasser son potentiel de long terme. En outre, ce regain d’activité économique a tendance à profiter à l’ensemble de la population, avec une création de richesses qui s’est amplifiée ».

« Il y a beaucoup d’interrogations en ce moment sur le maintien de la consommation privée aux États-Unis dans un contexte de guerre commerciale. La réalité, c’est qu’elle pourrait continuer à surprendre favorablement ». Il souligne toutefois qu’il existe un risque sur l’emploi américain, avec des chiffres récents qui ont montré quelques éléments de faiblesse, avec notamment une durée moyenne du chômage qui a atteint 24 semaines en décembre, à son niveau le plus élevé depuis trois ans. « Les entreprises américaines semblent un peu plus prudentes pour l’année à venir, notamment au niveau des nouvelles embauches ».

Démystifier les annonces

Bien entendu, une grande partie de l’incertitude pour les prochains mois vient des mesures qui seront prises par l’administration Trump, avec la crainte qu’elles ne provoquent une dégradation de l’environnement économique. « Nous avons cherché à démystifier les annonces faites jusqu’à présent, voir ce qui est réellement mis en pratique et déterminer leur impact potentiel au niveau économique ».

Au niveau des politiques douanières, Christopher Dembik souligne que l’Europe est le pays qui serait le plus affecté par la mise en place de tarifs. « Je pense toutefois que l’approche de Trump reste essentiellement transactionnelle, et nécessitera de la part de l’Europe d’acheter des hydrocarbures américains ». L’ensemble des mesures annoncées, y compris celles dont la mise en œuvre a été reportée d’un mois, ne concerne finalement que 5% du PIB américain, avec un impact économique qui devrait être au final assez modéré.

Du côté de la politique d’immigration, il souligne qu’une politique de déportation massive fait face à un problème d’infrastructure. « En outre, vous allez avoir assez rapidement plusieurs secteurs extrêmement dépendants de la main-d’œuvre étrangère qui vont venir frapper à la porte de la Maison Blanche. Dans le secteur agricole, ce sont ainsi 41% des travailleurs qui sont des migrants illégaux, qui vont donc être très difficiles à remplacer du jour au lendemain sans avoir une flambée du coup de la main-d’œuvre ».

IA et Europe

Christophe Dembik souligne qu’il y a aujourd’hui clairement une interrogation sur la capacité des actions technologiques à soutenir leur rythme de croissance, notamment avec l’arrivée de DeepSeek. « Plusieurs acteurs chinois cherchent aujourd’hui à faire aussi bien que les groupes américains à un coût moindre, mais avec un niveau d’erreur qui reste encore très élevé. Il convient de rester prudent par rapport à ces effets d’annonce sans avoir la capacité de vérifier  la véracité des données publiées ». Il pointe dès lors vers les chiffres trimestriels de NVidia qui seront publiés le 26 février, et autour duquel l’attention des investisseurs va vraisemblablement se focaliser.

Durant le mois écoulé, les indices américains sont restés en retrait tandis que les grandes places européennes ont atteint de nouveaux points hauts historiques. « Nous avons eu la deuxième plus importante rotation vers les actions européennes de ces 25 dernières années. Beaucoup d’investisseurs sont gênés par la concentration du marché américain, et sont donc à la recherche d’opportunités sur d’autres marchés ».

Pas soutenable

Christophe Dembik estime toutefois que ce mouvement poussé par la valorisation plus faible des marchés européens reste essentiellement un phénomène à court  terme. « Ce sont des flux tactiques qui n’ont pas vocation à durer. Pour avoir un retour durable des investisseurs internationaux, d’autres arguments seront nécessaires ». Il pointe le potentiel de croissance faible de l’Europe, avec un impact négatif potentiel d’une guerre commerciale avec les Etats-Unis. « Il faut se garder d’être trop optimiste sur les actions européennes », même s’il s’attend  à ce que la BCE descende son taux directeur vers 1,75% dans le courant 2025 pour soutenir une relance de l’activité économique.

Au niveau de l’allocation sur les bourses, il continue de privilégier les valeurs technologiques, avec une thématique de l’IA qu’il faut aussi aborder par la mise en place d’une production d’énergie à bas coût pour alimenter les centres de données. « Les programmes de subvention décidés par Biden vont continuer d’avoir un impact jusqu’en fin d’année, mais ce sont aujourd’hui les grands acteurs du privé (Amazon par exemple) qui augmentent leurs capacités de production dans le renouvelable ».

Pour la partie obligataire du portefeuille, Christopher Dembik privilégie une exposition sur le haut rendement européen, avec des risques bien identifiés et un taux défaut faible qui n’a que très légèrement augmenté. « Il y a toujours une très forte demande sur ce segment, mais avec beaucoup moins d’offre. En outre, les émetteurs de moins qualité ont été sortis du marché depuis la pandémie. Le haut rendement européen commence à avoir un niveau de qualité qu’on retrouve parfois sur la dette d’entreprise de meilleure qualité investment grade), mais avec un rendement beaucoup plus attractif ».

Frédéric Lejoint

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