Le financement mixte (blended finance en anglais) associe des capitaux privés et publics, ce qui permet à certains projets de voir le jour. Une telle forme de financement est promise à un grand avenir, y compris dans la lutte contre le changement climatique, estime Martin Ewald, Managing Director et Lead Portfolio Manager Blended Finance Private Equity chez Allianz Global Investors.
« Le financement mixte, surtout avec le capital social, est un domaine relativement nouveau. Le monde a besoin de ce type d’investissement, car il ne s’agit de rien de moins que de la lutte mondiale contre le changement climatique. Le monde ne pourra relever ce défi que si le capital privé est mobilisé parallèlement à des ressources publiques, qui sont en quantité limitée.
Seule la première source de financement est actuellement disponible en volumes plus importants, par exemple pour financer la transition vers les énergies renouvelables en Afrique, mais aussi dans d’autres pays émergents (EMDE), afin de faire sortir les pays de la dépendance aux combustibles fossiles. Toutefois, en raison des risques élevés, les investisseurs privés ne peuvent pas facilement investir l’argent de leurs clients dans de tels projets. C’est pourquoi des capitaux publics sont ajoutés en guise de tampon afin de ramener le risque de défaut pour les investisseurs privés à un niveau normal. Si le profil risque-rendement est bon, les investisseurs privés accueillent très favorablement ce type d’investissement.
Nous voyons que le financement mixte est promis à un grand avenir. En tant qu’investisseurs, nous disposons des compétences nécessaires pour être leaders dans ce secteur. Et nous sommes convaincus que nous avons besoin d’investissements d’un tout autre ordre de grandeur pour faire face aux effets du changement climatique.
Fonds africains
En 2019, nous avons créé l’AfricaGrow Fund of Funds, financé par des fonds publics et privés, dont le ministère allemand de la coopération et du développement économiques (BMZ) via KfW, Allianz et DEG. Il finance 150 PME et start-up innovantes par l’intermédiaire de fonds africains pour promouvoir le développement durable et l’emploi.
En 2021, l’Emerging Market Climate Action Fund (EMCAF) a été créé pour investir dans des fonds mondiaux dans les pays émergents et en développement qui se spécialisent dans la création de nouvelles capacités destinées aux installations d’énergie renouvelable, ainsi que dans le financement de l’adaptation, un autre domaine caractérisé par sa nouveauté et en pleine évolution.
L’EMCAF est financé par ce que l’on appelle le capital de premier rang et le capital de second rang. Des capitaux de second rang sont fournis jusqu’à hauteur de 200 millions d’euros par des gouvernements ou des investisseurs publics tels que le ministère fédéral allemand du climat et de l’économie via KfW, le Luxembourg, Nordic Development Fund et le gouvernement britannique par l’intermédiaire de FCDO. Le capital de premier rang, dont le montant s’élève à maximum 400 millions d’euros, provient d’Allianz, en tant qu’investisseur, de la compagnie d’assurances suédoise Folksam et de la Banque européenne d’investissement. Si le portefeuille ne génère pas un rendement global suffisant pour couvrir les risques des portefeuilles sous-jacents, le fonds est structuré de manière à ce qu’une grande partie du risque à la baisse soit absorbée par des capitaux de second rang ou des donateurs publics. C’est le tampon dont nous avons parlé en entamant cette discussion : le capital privé n’est pas entièrement protégé contre le risque d’investissement, mais il est tout de même suffisamment protégé pour rendre le profil risque-rendement plus supportable. Il s’agit de réduire les risques et non de subventionner des rendements privés par le secteur public. Ceci est d’autant plus important si nous nous concentrons sur les fonds propres, qui, à mon avis, sont nécessaires de toute urgence, car ils peuvent apporter du changement : les fonds propres font avancer les choses, la dette rend les économies d’échelle possibles !
Mobiliser une grande quantité de capitaux
Les fonds mixtes de financement peuvent mobiliser une grande quantité de capitaux pour le monde. La communauté internationale des donateurs est depuis longtemps convaincue que les milliards que nous utilisons actuellement pour lutter contre le changement climatique et ses conséquences doivent se transformer en milliers de milliards.
Il ne fait aucun doute que le changement climatique nous coûtera des milliers de milliards. Ça peut sembler effrayant. Mais à mon avis, le financement mixte public-privé constitue le moyen de s’attaquer à l’un des plus grands problèmes du monde. »