Le contexte reste favorable pour les grandes capitalisations américaines, avec des résultats trimestriels qui conforte une allocation sur ces valeurs.
A l’occasion de son récent webcast mensuel, Christopher Dembik (Conseiller en stratégie d’investissement chez Pictet Asset Management) s’est intéressé plus particulièrement aux Etats-Unis à la lumière des premiers résultats trimestriels et des difficultés rencontrées par certaines banques régionales ; mais également à la Chine au vu de la déprime persistante de son marché boursier.
Faits marquants
Mais tout d’abord, il a tenu à rappeler les faits marquants du mois écoulé qui sont un peu passés sous le radar des investisseurs. « Le plus important est la décision prise par les Emirats Arabes Unis et l’Arabie Saoudite de rejoindre les BRICS, ce qui en fait une des institutions économiques les plus importante au monde car elle exerce de facto un contrôle absolu du marché mondial des matières premières ».
Il pointe également le boom des investissements dans les pays émergents, notamment au Mexique et en Inde, avec un découplage économique qui reste plus que jamais d’actualité. Hors Chine, la croissance des pays émergents devrait ressortir au dessus de son potentiel à 3,9%, tandis que l’activité économique restera sous son potentiel aux Etats-Unis (1,2%), et anémique en Europe (0,6%).
Décrochages
Les derniers chiffres économiques pointent vers une économie américaine qui reste résiliente, avec une productivité qui tend même à remonter structurellement depuis plusieurs trimestres. Du côté de l’Europe, la situation est nettement moins favorable, avec des données qui pointent vers un décrochage rapide des conditions économiques, notamment dans le secteur manufacturier en France et en Allemagne. « Dans l’industrie chimique de ce pays, la production en volume a reculé de 21% depuis la fin 2021. C’est un recul massif qui cadre avec un scénario économique négatif qui aura des conséquences en termes d’allocation d’actifs ».
Dans ce contexte, Christopher Dembik constate que la politique monétaire est aujourd’hui trop restrictive des deux côtés de l’Atlantique, même dans un contexte où la croissance reste positive. « Les taux courts élevés font courir un risque inutile à la fois à l’économie réelle et aux marchés financiers. Plus particulièrement, il y a aujourd’hui une menace de déstabilisation du marché immobilier au niveau mondial ».
Opportunités américaines
Il souligne notamment les problèmes rencontrés par certains groupes immobiliers américains. « Les banques régionales américaines sont beaucoup plus exposées sur les prêts pour l’immobilier commercial que les grandes institutions bancaires. Selon nous, ce n’est pas un problème nouveau susceptible de faire dérailler l’économie américaine, car la Reserve Fédérale se montrera à nouveau active pour éviter une panique, par exemple en réduisant ou en arrêtant la réduction de la taille de son bilan ».
Dans le même temps, il souligne que les résultats ont été relativement bien orientés, avec des ventes et des bénéfices qui sont ressortis au-dessus du consensus. « Les grands groupes continuent d’attirer l’essentiel des flux financiers, mais ce n’est pas un argument pour rester à l’écart de ces géants. D’un point de vue historique, ce genre de concentration n’est clairement pas sain, mais ce phénomène a parfois tendance à durer plusieurs années. Nous continuons donc de penser qu’il ne faut pour le moment pas s’en détourner au regard de la solidité affichée par l’économie et par les entreprises américaines ».
Pour le cas de la Chine, il constate que si les valorisations semblent aujourd’hui fortement dépréciées, avec un marché qui est en chute libre depuis le mois d’août 2023 en dépit des nombreuses mesures destinées à soutenir les marchés financiers. « Les nouvelles mesures actuellement discutées pourraient freiner cette chute à court terme ou même permettre une stabilisation de la tendance, mais tant qu’il n’y aura pas un réel plan de relance budgétaire pour soutenir l’économie réelle, il faudra rester prudent sur les perspectives de ce marché ».
Haut rendement
Enfin, au niveau européen, il souligne qu’il faut rester sélectif sur les actions en privilégiant certaines sociétés résilientes, notamment dans le secteur des technologies de l’information. Il se montre actuellement le plus enthousiaste dans le domaine de la dette à haut rendement. « Nous n’avons pas un scénario de récession pour l’économie européenne, de sorte qu’il faut aujourd’hui s’intéresser à ce segment du marché en dépit des problèmes rencontrés par certains groupes immobiliers. Même sur ce segment qui reste compliqué, les émetteurs de bonne qualité ont continué à avoir accès au marché durant l’année 2023 ».
Il souligne que le High Yield européen bénéfice actuellement de rendements attractifs (autour de 6%) par rapport à un contexte économique qui ne devrait pas être négatif. « Pour le moment, nous n’avons pas vu de stress sur le marché par rapport à l’émetteur moyen sur le segment du haut rendement lors des refinancements », souligne Christopher Dembik, « avec des taux de défaut qui sont proches de la moyenne de long terme ».
Il constate également que la demande reste forte pour les émissions à haut rendement depuis le début de l’année avec une taille du marché qui a plutôt tendance à se réduire, une combinaison susceptible de continuer à faire pression sur les rendements de ce segment. « Les financements alternatifs (dette privée) et les intermédiaires bancaires ont fait leur retour depuis quelques mois, mais rien ne dit que ce mouvement est soutenable sur le long terme ».