Commentaires de Franck Dixmier, Global CIO Fixed Income chez AllianzGI.
- Nous estimons que la Banque centrale européenne devrait augmenter ses taux de 25 pb lors de sa réunion jeudi 14 septembre
- Malgré un ralentissement de l’économie en zone euro, l’inflation sous-jacente reste sur une trajectoire trop élevée pour justifier une pause
- Les marchés ne semblent pas préparés à cette hausse, ce qui devrait alimenter la tension sur les rendements observée pendant l’été
Après avoir relevé ses taux à chaque réunion depuis juillet 2022 pour une hausse totale de 425 pb, la Banque centrale européenne n’est plus en mode automatique. Deux options s’offrent à elle : faire une pause ou continuer son resserrement des conditions monétaires.
A défaut d’analyser une forward guidance désormais inexistante, il faut examiner les trois paramètres clés de la fonction de la BCE :
- L’inflation sous-jacente. Celle-ci est encore trop élevée, à +5.3 % en août sur un an. Ce niveau est d’autant plus préoccupant que la boucle prix-salaires est enclenchée en zone euro, dans un contexte où les gains de productivité sont nuls ou négatifs. Toute hausse des salaires se retrouve dans les coûts salariaux unitaires et est répercutée par les entreprises dans les prix. En outre, la tendance à la hausse des salaires – les coûts de la main-d’œuvre ont augmenté d’environ 5 % en glissement annuel au premier trimestre – devrait se poursuivre en 2024.
- Les anticipations à moyen-terme de l’inflation. Les prévisions de croissance et d’inflation seront communiquées lors de la réunion du 14, mais nous nous attendons à une révision à la hausse des perspectives d’inflation, qui devraient intégrer l’augmentation récente des prix du pétrole (+30 % sur les dernières semaines).
- La bonne transmission de la politique monétaire. Celle-ci fonctionne et les données d’activité publiées cet été ont confirmé la tendance au ralentissement de l’économie en zone euro, avec notamment un indice PMI des Services pour août à 47,9 qui rejoint l’indice PMI Manufacturier (43,5), en contraction pour la première fois en 2023. Le crédit est moins dynamique, que ce soit pour les ménages (+1.3 % en juillet sur un an contre +1,7 % en juin) ou pour les entreprises (+2,2 % en juillet sur un an contre +3 % en juin).
Nous estimons toutefois que cette décélération de la croissance en zone euro n’est pas encore suffisamment inquiétante pour justifier une pause, alors que les niveaux d’inflation sont encore loin de l’objectif de la BCE. Autre facteur préoccupant pour la banque centrale, la confiance des marchés dans sa capacité à atteindre ses objectifs s’érode graduellement, avec un léger désancrage des anticipations d’inflation (le 5y5y swap inflation est à 2,60 % au 07/09/23).
Le moment est donc opportun pour continuer à resserrer les conditions monétaires, et Christine Lagarde devrait annoncer une hausse de 25 pb lors de la réunion du 14 septembre.
Les marchés ont bien compris le thème « higher for longer ». Toutefois, en prisant une hausse supplémentaire de 25 pb avec une probabilité de 65 % pour cette année, et pas davantage, ils sous-estiment le potentiel de hausse des taux à venir. Les investisseurs ne semblent donc pas préparés à cette hausse, ce qui devrait alimenter la tension sur les rendements observée pendant l’été.