L’inflation américaine a chuté à 3,4% en glissement annuel en décembre – un recul impressionnant depuis le pic de près de 9% atteint en juin 2022. En excluant les prix volatils de l’énergie et des denrées alimentaires, l’inflation sous-jacente a diminué de 6,6% à 3,9%, tandis que l’indice PCE hors produits alimentaires et énergie, qui est souvent présenté comme l’indicateur favori de la Réserve Fédérale (Fed), s’inscrivait à 3.2% en novembre. Nous aurons de nouvelles données le 13 février prochain. Le marché espère bien que cela va aller dans le sens d’une prochaine d’une baisse des taux (150 points de base cette année prévue par le marché monétaire). Mais n’est-ce pas trop tôt pour crier victoire sur le front de l’inflation ?
De nouvelles hausses de prix à venir ?
Le processus de désinflation est bien amorcé. Cela va sans dire. Mais ce ne sera pas un long fleuve tranquille, sans à-coups, comme le pense le marché. Selon nous, le déclin rapide de l’inflation est principalement le résultat d’une correction du choc d’offre, tandis que le choc de demande continue d’avoir un impact. Pour s’en rendre compte, il faut examiner de plus près l’inflation sous-jacente et distinguer l’inflation des biens de celle des services. Après une hausse initiale majeure liée au choc d’offre négatif de la Covid, l’inflation des biens a rapidement reflué.
Ce n’est pas le cas pour les services. Elle reste élevée. Elle était à 7% en variation annuelle en février 2023 et à 5,3% en décembre 2023. C’est deux fois plus que son niveau normal d’avant Covid. La hausse de l’inflation dans les services est essentiellement tirée par la progression de salaires. Le risque persiste que les entreprises répercutent ces hausses de coût sur les consommateurs. C’est d’ailleurs ce qu’indiquent les dernières enquêtes auprès des PME concernant les perspectives d’évolution des prix à six mois.
Un cycle économique différent
Dans un cycle économique classique, l’augmentation des coûts salariaux est généralement absorbée par une réduction des marges des entreprises, qui ne peuvent pas répercuter ces coûts sur des consommateurs contraints de réduire leur demande en raison de la hausse des taux d’intérêt. Cependant, si la demande reste forte, les consommateurs peuvent absorber la hausse des coûts. C’est le cas actuellement : le choc positif de demande résultant de transferts gouvernementaux massifs n’est pas encore résorbé, rendant les consommateurs moins sensibles aux hausses de prix et de taux d’intérêt.
En outre, la transmission de la politique monétaire est plus lente que d’habitude, ce qui se traduit par une croissance des dépenses de consommation de services bien supérieure au rythme compatible avec une normalisation de l’inflation des services. Tant que la demande pour les services reste élevée, il est difficile d’entrevoir une baisse de l’inflation du prix des services hors loyers – qui est le PRINCIPAL indicateur que suit la Fed en ce moment. Les derniers chiffres montrent que celle-ci se situe à 3,9% en glissement annuel et qu’elle s’inscrit en hausse à 4,5% sur une moyenne de six mois. La lutte contre l’inflation n’est donc certainement pas terminée. C’est ce qui légitime que la Fed prenne son temps avant de baisser les taux.