Skip to main content

César Pérez Ruiz, Chief Investments Officer Pictet Wealth Management.

3 CHOSES A SAVOIR

  1. Les droits de douane annoncés le 2 avril par Washington sont le plus gros choc pour le commerce mondial depuis un siècle. Aux Etats-Unis, le risque de récession a fortement augmenté.
  2. L’économie mondiale subit des mutations profondes car les politiques américaines minent la confiance vis-à-vis des USA. En Europe, une renaissance s’amorce, tandis que la Chine innove et crée des perturbations sur les marchés.
  3. A court terme, la volatilité va demeurer et les actions internationales vont pâtir du risque de récession. Notre conseil: miser sur les valeurs refuges comme le franc suisse et l’or, et garder de quoi investir quand les choses se calmeront. Dans l’obligataire, le rendement des Bunds allemands augmente, ce qui les rend intéressants.

INTRODUCTION

Le 2 avril, le président Trump a dévoilé un vaste arsenal de tarifs douaniers, un coup de massue pour l’économie mondiale qui fait planer le risque de mesures de rétorsion de la part d’autres pays. Des mesures qui interviennent au moment où des mutations profondes bouleversent l’architecture économique mondiale: l’Europe connaît un renouveau structurel tandis que la Chine joue les trouble-fête dans le domaine de l’innovation technologique.

CONTEXTE

C’est un choc comme le commerce mondial n’en avait plus connu depuis un siècle, les nouveaux droits de douane américains étant plus élevés que prévu. Ils s’appliqueront à partir du 9 avril. La Chine a d’ores et déjà annoncé des mesures de rétorsion. De son côté, l’administration Trump ne semble pas vouloir revenir en arrière. L’incertitude qui entoure leur impact pourrait durer puisqu’il faut du temps pour négocier et mettre en œuvre. Il faut bien distinguer l’impact cyclique de la politique américaine de l’évolution structurelle à plus long terme de l’économie mondiale.

FLUCTUATIONS CYCLIQUES

Les droits de douane s’ajoutent aux suppressions de postes menées par le DOGE et au durcissement de l’immigration, deux éléments qui pèsent sur les perspectives américaines à court terme. La déréglementation et les allègements fiscaux pourraient jouer un rôle positif, mais se font attendre. L’incertitude plombe le moral des entreprises et des ménages, ce qui accroît le risque d’une récession aux Etats-Unis, et ailleurs.

Vendredi dernier, le président de la Fed, Jerome Powell, a indiqué que la banque centrale n’agirait pas dans la précipitation. Redoutant une flambée de l’inflation, elle attendra des preuves de ralentissement avant de prendre des décisions. De son côté, la BCE devrait baisser ses taux.

ÉVOLUTION STRUCTURELLE

Tout ceci survient au moment où l’économie mondiale connaît des mutations profondes. Le monde d’avant – celui des Etats-Unis garants de la stabilité économique, de la sécurité et de rendements élevés pour les capitaux étrangers – vacille car les politiques américaines minent la confiance à l’égard de la première économie mondiale. Les étrangers détiennent une immense quantité d’actifs américains (environ 90% du PIB) et le risque d’un rapatriement des capitaux n’est plus à exclure.

Parallèlement, la volonté allemande d’engager une relance budgétaire pourrait changer la donne et se diffuser en Europe, où le dynamisme de l’activité de prêt et l’assouplissement des politiques monétaires favorisent un vaste renouveau structurel.

En Chine, l’innovation a déstabilisé les marchés au point que les valeurs technologiques chinoises semblent désormais plus compétitives que leurs homologues américaines. En outre, le pays possède les outils nécessaires – en termes d’infrastructures, de talents et de puissance de calcul – pour déployer ses innovations dans l’IA dans d’autres secteurs, même si l’impact des droits de douane ne se fait pas encore pleinement sentir.

image

CONSÉQUENCES SUR LES INVESTISSEMENTS

Il est très difficile d’anticiper l’impact des droits de douane, de savoir dans quelle mesure l’exception américaine sera remise en cause, et donc de prévoir jusqu’où les actions pourraient reculer. Il faut cependant bien séparer le cyclique du structurel. Les marchés vont rester volatils et le risque de récession plane: les actions internationales seront donc sous pression. En cas de récession, il n’y aura pas de découplage: l’Europe et la Chine seront elles aussi dans la tourmente. La sélectivité va jouer un rôle clef.

Notre conseil: miser sur les valeurs refuges comme le franc suisse et l’or, tout en gardant de quoi investir quand les choses se calmeront et qu’il faudra revoir le positionnement stratégique. La composition de l’indice MSCI World i pourrait évoluer: la part des actions américaines pourrait baisser (de 72% actuellement à environ 62%), essentiellement au profit de l’Europe. Le dollar pourrait en souffrir, contrairement aux devises européennes.

S’agissant du rendement mondial, notre opinion est négative car le marché ne nous paraît pas intégrer assez le risque de récession aux Etats- Unis. Sur le marché de la dette souveraine, nous privilégions les obligations européennes, notamment pour les investisseurs basés sur le Vieux continent.

POUR CONCLURE

Les résultats des entreprises américaines seront à suivre de près dans les semaines qui viennent. Consommateurs et entreprises se disant qu’il faut acheter maintenant pour éviter les droits de douane, certains chiffres pourraient être faussés. Les prévisions financières seront elles aussi scrutées.

Les déclarations de la Maison-Blanche et des partenaires commerciaux des Etats-Unis dans les jours et les semaines qui viennent seront déterminantes. La probabilité que les Etats-Unis trouvent (et prennent) rapidement une bretelle de sortie est faible. Les enjeux sont majeurs et nous vivons un moment historique. Dans ce contexte, il faut garder la tête froide, prendre du recul et revoir sa feuille de route.

EFI

Author EFI

More posts by EFI