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Laurent Denize, Co directeur des investissements ODDO BHF AM.

« Pour ceux qui suivent la course mondiale à l’IA, l’émergence de DeepSeek rappelle opportunément que l’innovation ne provient pas seulement des géants bien établis. Elle peut venir de n’importe où. Personne ne peut prétendre détenir un avantage permanent »

Le 4 octobre 1957, le monde se réveillait sous le choc : l’Union soviétique avait dépassé les États- Unis dans la course à l’espace. La surprise créée par le lancement de Spoutnik, premier satellite artificiel au monde, fut si vive que cet événement marqua l’histoire. Certains qualifient aujourd’hui de « moment Spoutnik » chinois l’émergence de DeepSeek dans l’écosystème de l’intelligence artificielle. Dans quelle mesure peut-on comparer ces deux événements ? DeepSeek représente-t-il un moment charnière pour le secteur de l’IA ? Bouleverse-t-il le paysage de l’investissement ? Peut-il remettre en question l’exceptionnalisme américain ? Plutôt que laisser ChatGPT et DeepSeek faire l’analyse à notre place, utilisons nos propres neurones pour mesurer les effets de cette avancée de l’IA chinoise sur l’allocation d’actifs et le positionnement de nos investissements.

DeepSeek, la startup chinoise qui secoue le monde de l’IA

Fondée en 2023, la startup chinoise DeepSeek a rapidement fait parler d’elle dans le paysage de l’IA. Elle a récemment lancé deux grands modèles linguistiques (LLM) d’IA en open source du même type que ChatGPT, DeepSeek-V3, en décembre 2024, et DeepSeek-R1, en janvier 2025. Ces modèles atteignent des performances comparables à celles des modèles de pointe actuels pour un coût d’entraînement nettement moindre.

La Une des médias laisse entendre que le modèle V3 a été entraîné en deux mois à l’aide de seulement 2 000 puces Nvidia H800, pour un coût d’environ 5,6 millions de dollars US – une paille par rapport aux centaines de millions dépensés par OpenAI, Google ou Meta pour leurs propres modèles. Est-ce bien vrai ? La plupart des experts du secteur semblent reconnaître la performance de DeepSeek et ses gains en efficacité. Ils sont par ailleurs nombreux à penser que la méthodologie employée est pertinente, et que l’ordre de grandeur en termes d’économie de coûts est tout à fait plausible.

Quoi qu’il en soit, DeepSeek remet en question la croyance du « Bigger is Better » qui a prévalu dans le monde de l’IA au cours des dix dernières années.

Quel impact sur la macro-économie et la micro-économie ?

Du point de vue macroéconomique, le principal risque à court terme pour le PIB mondial est que l’entraînement plus efficient des modèles et la baisse des coûts de calculs fassent chuter les dépenses d’investissement dans les infrastructures liées à l’IA. . Cet impact serait particulièrement aux États-Unis, où ​ il pourrait ​ coûter au PIB ​ entre 0,1 et 0,2 point, selon certaines estimations.

Toutefois, les « Hyperscalers » (des fournisseurs de services cloud à très grande échelle, essentiellement Microsoft, Meta, Amazon et Alphabet) ont récemment réitéré leur engagement à maintenir leurs dépenses d’investissement. Nous estimons donc que l’émergence d’une nouvelle technologie à des coûts de développement bien moindres pourrait, à moyen terme, rebattre les cartes du paysage concurrentiel actuel. Dans un tel scénario, les bénéfices de l’IA vont se diffuser bien plus rapidement et à plus grande échelle, accélérant et élargissant ainsi l’adoption de l’IA et les gains de productivité. D’un point de vue macroéconomique global, cette dynamique devrait donc stimuler la croissance mondiale.

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