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La liquidité constituera la principale interrogation pour les prochains mois, et les marchés ont déjà trop anticipé les futures baisses des taux directeurs.

A l’occasion de son webcast mensuel pour Pictet Asset Management, Christopher Dembik a présenté son analyse de la situation actuelle sur les marchés financiers après un resserrement des conditions financières qui n’avait plus été observé en quarante ans. Alors que le combat contre l’inflation est en bonne passe d’être gagné des deux côtés de l’Atlantique, il a également dressé les principaux points d’attention pour bien aborder 2024.

Points de tension

« L’année 2024 risque d’être parsemée d’élément localisés et disruptifs, mais nous devrions éviter un événement systémique comme une récession mondiale, et des risques géopolitiques qui devraient rester faibles. En revanche, il faudra s’habituer à des points de tension qui apporteront ponctuellement une dose de volatilité sur les marchés financiers ».

« Dans les pays développés, la progression de l’activité économique sera faible (0,8%) et sous son potentiel de long terme (1,5%). Heureusement, les pays émergents vont continuer d’apporter du dynamisme économique (3,8%) avec deux pays qui vont se démarquer : la Chine (4,8%) et l’Inde (6,4%) ». Il souligne toutefois que la bonne performance de cette région ne va plus constituer un relai de croissance important pour l’Europe, comme cela fut le cas au sortir de la crise financière.

L’année 2024 va également être marquée par la détente des politiques monétaires. « Au niveau économique et financier, il faudra garder à l’œil la liquidité sur les marchés financiers ». Christopher Dembik souligne que ce terme englobe trois concepts: premièrement, la capacité de trouver un acheter et un vendeur pour un actif financier à tout moment et à un prix donné ; deuxièmement, la capacité d’une économie à créer du crédit et à financer sa croissance; et troisièmement, un facteur de confiance des différents acteurs dans le système financier et dans l’économie. « Plus la liquidité est élevée dans votre économie, plus les conditions seront favorables pour dégager une croissance rapide ».

Europe restrictive

Il constate qu’en dépit du resserrement des taux directeurs de ces deux dernières années, les conditions financières ne sont pas encore trop restrictives. « Le coût pour emprunter augmente, mais la liquidité reste encore disponible ». Si Christopher Dembik estime que la politique menée par la Fed est correcte d’un point de vue des conditions de liquidité, il pointe que la BCE est devenue trop restrictive, avec notamment des octrois de nouveaux crédits qui sont au plus bas depuis 2015. « Pour la France, le taux directeur optimal de la BCE par rapport à l’inflation et à la croissance potentielle devrait plutôt se situer actuellement autour de 2,9 voire 3% ».

Et cette constatation est vraie pour quasi tous les pays membres de la zone euro. « Nous pensons donc qu’en essayant de rattraper le retard pris pour durcir sa politique monétaire en 2022, la BCE a probablement été trop loin avec un niveau de liquidité qui est aujourd’hui préjudiciable pour la croissance économique et les prix des actifs risqués dans la zone euro ».

La région qui détonne dans ce contexte est le Japon, avec une liquidité qui reste favorable et qui permet d’anticiper une évolution économique positive durant les prochains trimestres. « Il s’agit actuellement d’une forte conviction de notre équipe », souligne Christopher Dembik, « avec un secteur privé qui est aujourd’hui en mesure d’abreuver l’économie de liquidités et de soutenir les cours des actions ».

Déficits publics

L’année 2024 va également être marquée par la nécessité de refinancer les déficits publics dans les pays développés, à des conditions nettement moins favorables que par le passé, un problème qui sera particulièrement tangible au niveau américain avec un déficit budgétaire anormalement élevé par rapport au cycle économique. « Comme en France, le service de la dette est aujourd’hui le principal contributeur à la hausse des défenses fiscales aux Etats-Unis ».

Et le problème est aujourd’hui la baisse des achats de la part de certains acheteurs historiques de bons du Trésor, comme la Chine ou le Japon. « A moyen ou long terme, si ce mouvement se confirme, nous aurons une augmentation structurelle du coût de refinancement sur la dette américaine ».

Détente européenne

Dans ce contexte, la logique voudrait que la BCE soit la première à détendre sa politique monétaire vers le mois d’avril, en raison du caractère déjà assez restrictif de la politique menée et des dégâts qui commencent à être apparents sur l’économie. « Je ne m’attends pas non plus à cinq ou six baisses du taux directeur de la BCE, ce qui serait aberrant au regard des indicateurs macroéconomiques ». 

Pour les prochaines semaines, il ne s’attend pas non plus à ce que le rally boursier de la fin 2024 puisse s’inscrire dans la durée, en raison des attentes trop optimistes sur les baisses de taux des banques centrales. « Nous recherchons plutôt un positionnement sur les actions défensives et de qualité, ce qui nous semble être opportun au regard des conditions de marché. Les actions japonaises et indiennes constituent également une opportunité de long terme ».

« Et au niveau obligataire, nous préférons les maturités courtes car les anticipations de baisse des taux nous semblent excessives au vu d’une absence de récession dans les pays développés. La volatilité sur les taux longs est actuellement très élevée et similaire à ce que nous avons historiquement connu lors des périodes de crise. C’est sur les taux longs que se situent actuellement les principaux facteurs de risque ».

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