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En dépit des inquiétudes sur la croissance aux Etats-Unis, le stratégiste de Pictet Asset Management estime que le scénario d’un atterrissage en douceur reste central, et continue de conseiller une exposition marquée sur la technologie américaine.

Le début des vacances a été marqué par de nombreux événements, comme le retrait de Joe Biden pour la course à l’élection présidentielle américaine, la publication de données économiques inquiétantes aux Etats-Unis et un mouvement de correction sur le secteur technologique. Nous avons donc interrogé Christopher Dembik Dembik (Conseiller en stratégie d’investissement chez Pictet Asset Management) afin qu’il nous livre son analyse des récents événements avant la rentrée de septembre. 

Pas d’inquiétude

« La santé de l’économie américaine a constitué le principal questionnement des marchés durant les dernières semaines. Lorsque nous regardons l’intégralité des indicateurs, et donc pas uniquement le dernier rapport publié par le département du travail, le marché de l’emploi reste sain. Les chiffres publiés récemment ont également été influencés par des éléments exceptionnels, notamment les conséquences de l’ouragan Beryl qui a fortement touché le Texas ». Il s’attend dès lors à un ajustement favorable lors des prochaines publications, notamment au niveau du taux de chômage.

« Nous ne sommes pas inquiets quant à l’orientation de l’économie américaine, et nous continuons de tabler sur un scénario d’atterrissage en douceur ». Pour Christopher Dembik, les marchés ont eu une réaction exagérée par rapport aux statistiques publiées, et même si une partie des stratégistes table désormais sur une détente de 0,5% du taux directeur de la Reserve Fédérale en septembre, il reste convaincu que l’assouplissement devrait rester limité à 0,25%. « Nos attentes pour la BCE sont identiques, avec une baisse du taux directeur de 0,25% en septembre ».

Marchés sanguins

« Cette réaction sanguine des marchés boursiers s’explique également par des niveaux anormalement bas de liquidités sur les marchés, qui sont aujourd’hui à des niveaux qui n’avaient plus été observés depuis mars 2020. Même pour les mois d’été, le niveau actuel est  anormalement bas, ce qui explique effectivement que le marché s’est montré très violent sur les déceptions au niveau des entreprises ou des statistiques économiques durant les dernières semaines », estime encore Christopher Dembik.

Il souligne que le marché a également exagéré la correction des valeurs technologiques, notamment sur un groupe comme NVidia. « Nous voyons plutôt la baisse actuelle comme une opportunité de se renforcer, notamment si les résultats trimestriels (qui seront publiés le 28 août) sont bons ». D’ici là, il estime toutefois que la volatilité risque de rester élevée, et qu’il est préférable de rester en position d’attente au risque de louper une partie de la hausse. Il constate également que durant les neuf derniers trimestres, Nvidia a dépassé les attentes à huit reprises ; et que les principaux clients du groupe ont confirmé qu’ils continuaient à investir fortement dans l’Intelligence Artificielle.

Positionnement politique

Concernant les bouleversements intervenus ces dernières semaines au niveau du candidat du parti démocrate pour la présidence américaine, Christopher Dembik souligne qu’il y a encore relativement peu de visibilité sur le positionnement économique de Kamala Harris. « Tim Walz, son colistier, c’est en revanche bien exprimé. Il avait cette expression en 2018 qui était assez jolie : l’économie est un jardin. Il est favorable à un modèle de démocratie sociale à l’européenne ».

« Quel que soit le vainqueur, je crains toutefois qu’il y aura une  incapacité politique à faire passer de nouvelles mesures de stimulus en raison de la difficulté à obtenir des coalitions nécessaires au niveau de la Chambre des Représentants et du Sénat ». Il estime dès lors qu’il n’existe pas de grandes différences dans les actes que seront en mesure de passer les deux candidats. « Trump souhaite exercer un contrôle plus étroit sur la Réserve Fédérale, mais il n’est pas certain qu’il sera en mesure de l’obtenir. Il souhaite également un dollar plus faible, mais ce souhait s’oppose à sa volonté de mettre en place une politique économique plus protectionniste ».

Sortie de l’Europe

Au niveau de l’allocation d’actifs, Christopher Dembik souligne donc que le positionnement continue de privilégier les actions américaines en général, et la technologie en particulier. « Les incertitudes politiques et la faiblesse de la saison des résultats trimestriels nous a toutefois amené à réduire notre exposition sur les actions européennes, d’autant que dans le même temps les chiffres trimestriels américains ont plutôt réservé de bonnes surprises ».

Il souligne que les groupes exportateurs européens sont souvent dépendants de l’Asie (et plus particulièrement de la Chine), des zones où les dépenses de consommation restent sous pression. « Nous restons également à l’écart de la Chine, car nous attendions des mesures de relance à l’occasion du plénum du parti communiste chinois qui s’est tenu durant le mois de juillet, mais rien n’a été finalement décidé. Ceci repousse l’effet économique de nouvelles mesures au début 2025, et retarde également un éventuel impact favorable pour l’Europe ».

Au niveau asiatique, il estime qu’il faut continuer de privilégier des marchés comme le Japon ou l’Inde. « Le Japon reste au cœur de notre allocation en Asie. Même si la consommation ne se redresse pas aussi rapidement que prévu, les entreprises japonaises se portent bien, avec des sociétés leaders moins exposées sur l’IA et moins sensibles à l’effet taux de change. Donc, pour nous, c’est toujours pertinent d’être investi sur ce marché. Et si l’Inde reste un marché cher, il affiche traditionnellement une prime importante par rapport aux autres marchés de la région, et ce facteur ne doit donc pas détourner les investisseurs de ce marché ».

Frédéric Lejoint

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