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Sophie Slits, Estate Planner, Nagelmackers.

Votre partenaire occupe une place particulière dans votre vie. Que pouvez-vous faire pour qu’il soit financièrement et juridiquement bien protégé en cas de décès ou d’incapacité, que vous soyez mariés, cohabitants légaux ou simplement domiciliés sous le même toit ?

En ce mois de février, les amoureux sont à l’honneur. Qu’ils soient mariés, cohabitants légaux ou simplement domiciliés sous le même toit, ces amoureux nous demandent souvent lors de nos entretiens comment ils peuvent se protéger l’un l’autre en cas de décès.

Le choix juridique de votre union entraîne d’importantes conséquences tant sur le plan juridique que fiscal durant votre vie mais également au moment de votre décès.

1. Dévolution successorale légale des partenaires

Si vous n’avez pas fait de testament, le législateur a pris des dispositions afin de déterminer qui sont vos héritiers et ce à quoi ils ont droit.

Il s’agit dans ce cas de la ‘dévolution légale’, dont voici les règles spécifiques pour les partenaires.

Le conjoint survivant se voit attribuer un statut spécial parce qu’il hérite toujours, quelles que soient les personnes avec lesquelles il accède à la succession.

Vous avez des enfants ? Le conjoint survivant hérite toujours de l’usufruit de la succession et les enfants de la nue-propriété.

Vous n’avez pas d’enfants ? Le conjoint survivant hérite de la pleine propriété du patrimoine commun ou indivis constitué ensemble quel que soit le régime matrimonial. Le conjoint survivant hérite de l’usufruit des biens propres du défunt. Les autres héritiers (frères, sœurs, mère, père) héritent de la nue-propriété.

Si le conjoint survivant vient en concours avec des héritiers très éloignés (oncles, tantes, cousins…), le conjoint survivant recueille toute la succession en pleine propriété.

  • Et qu’en est-il des cohabitants ?

Commençons par les cohabitants légaux, ceux qui ont déposé une déclaration de cohabitation légale devant l’officier de l’état civil.

En tant que cohabitant légal survivant, vous héritez de l’usufruit sur la maison familiale et les meubles meublants. Les autres héritiers légaux, comme vos enfants, recueillent la nue-propriété de la maison familiale et la pleine propriété des autres biens.

Ce droit successoral légal est donc assez limité. En outre, le cohabitant légal n’est pas un héritier réservataire. Le droit successoral sur l’habitation familiale est par conséquent incertain car il peut lui être retiré par le biais d’un testament. A contrario, le conjoint survivant marié bénéficie de droits successoraux plus sûrs vu qu’il est un héritier réservataire.

Enfin, terminons avec les cohabitants de fait, à savoir ceux qui sont domiciliés à la même adresse. En vivant en cohabitation de fait, vous n’héritez légalement de rien de votre partenaire. Si vous vous trouvez dans cette situation et que vous souhaitez vous attribuer des droits successoraux, vous devez prendre des mesures. Par exemple, vous pourriez établir chacun un testament.

Plus que jamais, il est clair que les droits successoraux de votre partenaire diffèrent fortement en fonction du statut de votre union. La présence d’enfants communs ou d’un premier lit peut également avoir une influence sur l’héritage de votre partenaire.

2. Planification successorale

Dans la pratique, nous remarquons que les partenaires veulent aller plus loin que ce qui a été prévu par la loi, ils veulent s’attribuer des garanties supplémentaires pour se protéger. Ils ont souvent des bonnes raisons pour ce faire. Cela peut être le cas d’un couple qui n’a pas d’enfants ou par exemple, d’un couple qui estime que leurs enfants sont encore trop jeunes ou immatures pour être impliqués dans des démarches de structuration de patrimoine.

On parle dans ce cas d’une planification horizontale, à savoir une planification de patrimoine entre partenaires.

Dans un premier temps, ils travaillent entre eux sans optique de transmission à la génération suivante.
A quels instruments de planification patrimoniale peuvent-ils faire appel ?

  • Le contrat de mariage

Si vous êtes mariés, il est important d’analyser sous quel régime matrimonial et, s’il y a un contrat de mariage, quelles clauses d’attribution de patrimoine ont été convenues entre vous.
Pour les personnes qui vont se marier ou qui se sont mariées, le recours à un contrat de mariage et le choix d’un régime matrimonial permet de mettre en place une planification horizontale.
Nous pensons ici, par exemple, à l’ajout d’une clause d’attribution alternative du patrimoine commun pour les couples mariés sous le régime de la communauté. Pour les couples mariés sous le régime de la séparation de biens, cette clause d’attribution alternative peut s’appliquer s’ils ont créé entre eux un patrimoine commun interne.

Par l’ajout d’une clause d’attribution alternative, le conjoint survivant pourra, au moment du décès de son conjoint, faire un choix entre plusieurs options quant à la manière dont le patrimoine commun lui sera attribué. Ce choix variera en fonction de ses souhaits à ce moment précis et aura son propre traitement fiscal.

  • La donation

La donation est possible pour les différentes formes d’union.

La donation entre époux est bien évidemment un instrument très pratique. Les donations entre époux faites hors contrat de mariage sont toujours révocables. Cela est d’autant plus important si le mariage devait un jour se solder par un divorce.

Pour les cohabitants (légaux ou de fait), il en va autrement. La donation est irrévocable. Donner c’est donner.

Une clause de retour conventionnel peut aussi être ajoutée à la donation. Cette clause permet que les biens donnés puissent réintégrer le patrimoine du donateur en exemption de droits de succession s’il devait y avoir prédécès du donataire.

Une donation entre époux est uniquement possible sur les biens propres. Ainsi, les biens qui appartiennent à la communauté ne peuvent pas faire l’objet de donations entre époux.
En cas de donation, vous devez tenir compte de la réserve de vos enfants. La part dont vous pouvez toujours disposer librement, et donc donner à votre partenaire, s’élève à la moitié de votre patrimoine.

  • Le testament

Un testament est un acte par lequel vous déterminez à qui reviendra une partie de votre patrimoine au moment de votre décès.

Vous décidez aujourd’hui ce qu’il adviendra de votre patrimoine après votre décès.

La rédaction d’un testament peut être utile, voire nécessaire, quand les partenaires veulent se protéger de manière optimale ou veulent attribuer quelque chose au moment de leur décès.

Vous êtes mariés et vous n’avez pas d’enfants ? La loi prévoit que le conjoint survivant ainsi que les parents, les frères et les sœurs du défunt seront appelés légalement à la succession. Parfois, cela n’est pas souhaité. Dans pareille hypothèse, il est possible de déroger à la dévolution légale par le biais d’un testament. Les parents n’étant plus considérés comme des héritiers réservataires, la totalité de la succession pourrait dès lors être attribuée au partenaire survivant par ce biais.

Les cohabitants de fait n’héritent pas automatiquement l’un de l’autre et les cohabitants légaux n’ont qu’un droit successoral limité (usufruit sur le logement). Il peut dès lors être utile de s’avantager mutuellement par le biais d’un testament.

Un testament ne prend effet que lors du décès et présente l’avantage de toujours pouvoir être révoqué.

Il ne faut toutefois jamais perdre de vue la réserve des enfants qui correspond à la moitié du patrimoine du parent défunt.

  • La clause d’accroissement

La clause d’accroissement est un contrat par lequel deux parties prévoient réciproquement qu’en cas de décès de l’une d’elles, certains biens mobiliers viendront accroître le patrimoine de l’autre.
De par la nature aléatoire de ce contrat, aucun droit de succession ou de donation n’est dû sur l’accroissement du patrimoine mobilier. Cette technique de planification patrimoniale est néanmoins dans le collimateur du fisc. Chaque région a ainsi fixé ses propres conditions. C’est pourquoi il est d’autant plus important de contacter votre conseiller juridique ou votre notaire à cet égard.

  • Assurance vie – Clauses bénéficiaires

Lorsque vous souscrivez votre assurance vie, vous pouvez indiquer qui sera le bénéficiaire du capital en cas de décès. A défaut d’indication précise, le capital sera attribué à votre succession au moment de votre décès.

L’assurance-vie vous permet donc de désigner des bénéficiaires qui vous sont chers.

N’oubliez cependant pas de vérifier de temps en temps que ces bénéficiaires sont toujours les personnes à qui vous voulez attribuer le capital décès.

Sauf acceptation expresse du bénéfice de l’assurance-vie par le bénéficiaire, vous avez la possibilité d’adapter selon vos souhaits le nom du bénéficiaire au cours de votre vie.

Enfin, selon la structure de l’assurance-vie et selon le lien juridique avec le bénéficiaire, il peut y avoir des différences au niveau fiscal mais aussi au niveau de la répartition du capital décès.

Faites le point régulièrement et renseignez-vous auprès de votre banquier ou assureur.

3. Quels sont les tarifs appliqués en matière de droits de succession ?

Les droits de succession varient en fonction de la région où se trouve le domicile du défunt mais aussi en fonction du statut juridique entre le partenaire et le défunt.

  • A Bruxelles et en région wallonne

Les époux et les cohabitants légaux bénéficient des mêmes tarifs variants entre 3 et 30%. Leur part héritée dans la maison familiale est exonérée de droits de succession.

Les cohabitants de fait sont quant à eux soumis aux tarifs pour ‘toutes autres personnes’, ces tarifs varient entre 40 et 80% et portent sur tout le patrimoine.

  • En région flamande

Les cohabitants légaux et les personnes mariées bénéficient immédiatement du tarif ‘en ligne directe et entre partenaires’ variant entre  3 et 27% , de l’exonération de l’habitation familiale et de l’exonération de la première tranche de 50 000 EUR sur les biens mobiliers.

Les cohabitants de fait n’héritent pas automatiquement l’un de l’autre. S’ils se favorisent mutuellement par testament, le tarif entre ‘toutes autres personnes’  variant entre  25% et 55% sera applicable la première année. Après un an de cohabitation, ils peuvent par contre bénéficier du tarif ‘en ligne directe et entre partenaires’ et de l’exonération de la première tranche de 50 000 EUR sur les biens mobiliers. L’habitation familiale ne sera cependant exonérée qu’après trois ans de cohabitation.

4. Protection de la personne

Dans le cadre d’une réflexion sur la protection de son partenaire, on pense souvent dans un premier temps au moment du décès. Mais que se passerait-il si vous étiez victime d’un accident ou d’une crise cardiaque ?

Avec un mandat de protection, vous donnez à votre partenaire un mandat pour gérer votre patrimoine quand vous ne serez plus en état de le faire.

Ainsi vous éviterez que votre patrimoine ne soit bloqué et que du temps ne soit perdu parce qu’un juge de paix doit intervenir.

Un mandat de protection peut se faire sous seing privé mais sa forme notariée a notre préférence. Il doit obligatoirement se faire sous forme notariée s’il comprend des actes portant sur des immeubles.

Ce mandat vous permet également de prévoir une planification successorale in extremis.

Un mandat de protection doit être vu comme un parachute, dont on espère ne jamais avoir besoin. Mais comme le dit l’adage, mieux vaut prévenir que guérir.

5. Au niveau de l’impôt des personnes physiques

Sur le plan fiscal, les cohabitants légaux sont assimilés aux personnes mariées. Ils remplissent donc une déclaration d’impôts commune et les revenus et l’imposition sont établis individuellement.

Ils peuvent profiter du quotient conjugal, c.-à-d. que si un partenaire dispose d’un revenu professionnel très bas (voire nul), le fisc lui octroie fictivement une partie des revenus professionnels de l’autre.

Ils peuvent accorder une rémunération au partenaire qui les aide dans leur activité.

Les cohabitants de fait remplissent chacun leur propre déclaration d’impôts et ils sont traités comme des personnes isolées.

Vous le constatez, il existe des différences fiscales significatives selon la manière dont vous êtes unis juridiquement avec votre partenaire.

Vous songez à vous marier ou à faire une déclaration de cohabitation légale ? Informez-vous auprès d’un expert fiscal pour connaître, par le biais de simulations, l’impact de cette union sur votre déclaration fiscale ainsi que celle de votre partenaire. Ainsi vous éviterez des surprises.

6. Au niveau de la pension

En fonction du type d’union juridique dans laquelle vous vivez, votre pension sera différente à savoir pension de ménage, pension d’isolé ou pension de survie.

Tout comme pour la fiscalité, renseignez-vous avant le mariage ou la cohabitation légale, de l’impact de cette union sur votre future pension.

La manière dont vous organisez votre union juridiquement peut avoir des conséquences considérables sur le plan de la fiscalité, de la pension et du décès.

L’amour doit être le moteur de votre union mais informez-vous avant de faire le grand pas vers le mariage ou la cohabitation légale. De même, rester cohabitants de fait doit être réfléchi.

Dans le cadre de la planification horizontale, il existe différents instruments de planification successorale pour se protéger l’un l’autre en cas de décès. Certains ont un effet immédiat, d’autres sont d’application au moment du décès ou au moment d’une incapacité. Ces instruments ont des conséquences civiles et fiscales qui varient en fonction du statut juridique de votre couple (mariage, cohabitant légal ou cohabitant de fait).

Enfin, la planification horizontale est une solution ‘temporaire’ qui ne produira ses effets que lors du premier décès. Le partenaire survivant devra entamer lui-même certaines démarches s’il souhaite planifier la transmission de son patrimoine à la génération suivante.

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