César Pérez Ruiz, Chief Investment Officer et responsable des investissements Pictet Wealth Management.
Récession discrétionnaire
Les marchés ont progressé la semaine dernière dans l’espoir d’un accord concernant le plafond de la dette américaine, mais le bras de fer avec les Républicains s’est poursuivi vendredi à la Maison- Blanche. Le président Biden espère malgré tout trouver un compromis prochainement. Après les commentaires de certains membres plus agressifs de la Fed, les marchés jugent plus probable une hausse des taux au mois de juin. Mais au vu des frictions causées par la réduction du volume des prêts bancaires, le président de la Réserve fédérale, Jerome Powell, a fortement suggéré une pause (conformément à notre scénario). Les indicateurs américains restent mitigés. La production industrielle a bondi en avril grâce à une forte augmentation de la production automobile. Après deux mois de baisse, les ventes de détail se sont également redressées, mais bien moins qu’anticipé. En outre, les résultats trimestriels des grands distributeurs ont indiqué un ralentissement généralisé des dépenses de consommation discrétionnaire. S&P Global a signalé une forte hausse du nombre d’entreprises ayant déposé le bilan aux Etats-Unis (chapitre 11) depuis le début de l’année. Parallèlement, l’indice de confiance publié par l’Association nationale des constructeurs de maisons individuelles est passé de 45 à 50 en avril. Les rendements obligataires se sont inscrits en hausse et le S&P 500 a réalisé sa meilleure performance hebdomadaire depuis mars, reflétant la résistance des indicateurs et des résultats trimestriels meilleurs qu’attendu. Nous sommes positifs sur les cours du pétrole, alors que les Etats-Unis redoutent des pénuries d’approvisionnement au second semestre et se préparent à acheter 3 millions de barils pour leur réserve stratégique.
En Europe, le choc des termes de l’échange a été absorbé, la zone euro affichant un excédent commercial corrigé des variations saisonnières de 17 milliards d’euros en mars, contre un déficit de 0,2 milliard en février. L’amélioration des perspectives a contribué à la hausse des rendements obligataires, tout comme les commentaires de Christine Lagarde (présidente de la BCE) estimant que les taux seraient «durablement plus élevés». Les actions européennes incitent plus à l’optimisme que les actions américaines. Mais nous surveillerons de près la situation géopolitique, alors que certains pays européens envisagent la livraison d’avions de combat F-16 à l’Ukraine.
Les marchés asiatiques ont montré des visages très divers. En Chine, les récents chiffres des investissements en immobilisations, des ventes de détail et de la production industrielle ont tous été décevants. Après un démarrage en trombe dans le sillage de la réouverture, l’économie chinoise semble traverser un trou d’air. C’est pourquoi les indices chinois sont à la traîne ces derniers temps. La semaine dernière, l’indice du secteur immobilier a même accentué ses pertes depuis le début de l’année, ce qui ne manque pas d’inquiéter. Dans ce contexte, le yuan a chuté sous le seuil psychologique de 7 yuans pour 1 dollar. Les pressions se sont intensifiées au cours du week-end, les dirigeants du G7 critiquant la politique économique de la Chine. Au Japon, le Topix a atteint son plus haut niveau depuis 30 ans grâce à une bonne surprise concernant le PIB du premier trimestre, tandis que les réformes visant à améliorer l’efficacité du capital montent en puissance. De nouveaux rachats d’actions attirent ainsi les investisseurs étrangers à Tokyo. Nous sommes de plus en plus optimistes à l’égard des actions japonaises.